Sommaire
Nos politiques publiques à l’épreuve des crises – Laure Curvale
« Replacer l’économie au service de l’humain » – Maud Dumont
Budget primitif sur les mobilités : entre gaspillages et nécessités
Crise sanitaire : la santé mentale des jeunes encore plus mise à rude épreuve – Maud Dumont / Agnès Destriau
Communiqué de presse : Un budget à l’épreuve des crises ?
Nos politiques publiques à l’épreuve des crises
Laure Curvale, Co-Présidente du groupe, a pris la parole au nom du groupe en début de ce conseil départemental. Aux prémices de la cinquième vague de l’épidémie de covid-19 qu’on nous annonçait terminée, elle a alerté sur les impacts de cette crise sanitaire sur la santé mentale des jeunes et des moins jeunes. Les impacts économiques étant aussi importants, cela engage la responsabilité du Département quant à la bonne gestion de l’argent public face aux crises sanitaires, sociales et écologiques.
Pour arriver à cette exigence, il faut pouvoir prioriser objectivement nos politiques. Un budget climat, combiné avec un budget carbone, ainsi qu’un budget sensible au genre permettraient d’aiguiller nos politiques publiques sans se tromper de voie.
Elle a aussi rappelé que “la clarté et la cohérence de nos décisions politiques pour répondre à l’urgence écologique qui est à la fois climatique, sociale et économique” sont essentielles pour faire face aux enjeux et bénéficier de la confiance des Girondines et Girondins .
L’intervention de son intégralité :
“Monsieur le Président, mes cher.e.s collègues,
Nous tenons d’abord aussi à vous remercier pour l’hommage que vous avez rendu à nos collègues disparus.
Vous l’avez dit, Monsieur le Président, nous sommes confrontés à cette cinquième vague de la crise sanitaire qui nous touche depuis bientôt un an et demi.
Vous en avez rappelé les chiffres et le niveau 2 du plan blanc a été déclenché au CHU de Bordeaux la semaine dernière, comme ailleurs, ce qui est le signe d’une accélération du nombre de patients pris en charge atteints du Covid.
Place à l’urgence. De nouveau, des opérations sont reportées. De nouveau, des lits de réanimation sont rouverts, nous replongeant dans cette cinquième vague avec angoisse et lassitude. Car suite aux annonces du gouvernement, c’est la ruée vers la troisième dose, sans que les moyens de se faire vacciner soient encore suffisants.
De nouveau, certains EHPAD doivent limiter les visites des familles pour protéger leurs résidents face au virus. 34 300 personnes sont décédées entre mars 2020, mais 2021 dans les EHPAD. Et combien de décès sont imputables à l’isolement grandissant, aussi bien à domicile, en résidence ou en établissement ?
Le déferlement de cette cinquième vague est également à craindre du côté de la jeunesse. Un rapport publié par la défenseure des droits Claire Hédon met en lumière l’aggravation du mal être structurel des enfants en raison de la crise sanitaire.
Nous reviendrons sur ce sujet à l’occasion de la motion portant sur l’amélioration du bien-être et de la santé mentale des jeunes. Elle sera présentée par Maud Dumont, au nom des trois groupes politiques de notre majorité.
Cette cinquième vague aura aussi des conséquences économiques qu’il faudra savoir accompagner à tous les échelons. Les crises, qu’elles soient sanitaires, sociales ou écologiques, avec le manque de marge de manœuvre que nous laisse l’État en matière fiscale, nous rappellent que nous n’avons pas le droit à l’erreur – cela sera expliqué lors de la présentation du budget – parce que notre responsabilité est grande dans la dépense de l’argent public.
Nous attendons avec impatience le budget résilient annoncé pour 2022, conjugué avec le budget carbone. Il doit nous permettre d’objectiver le poids des grands projets et de guider nos décisions pour atteindre l’objectif des accords de Paris. Cette approche globale systémique doit s’appliquer à toutes nos politiques, tous nos projets.
Nous le savons, en Gironde comme ailleurs, nous nous devons de limiter l’artificialisation des sols, et notamment celle causée par la création de déviations inutiles et autres contournements, facteurs d’étalement urbain et de pollution. La trajectoire devrait être droite pour atteindre la limitation du réchauffement climatique à un demi degré.
Le budget résilient pourrait trouver son pendant en termes d’égalité femmes-hommes dans un budget sensible au genre. Le rapport annuel sur l’égalité femmes-hommes qui nous sera présenté nous énumère ce que notre département met en œuvre. L’adoption d’un budget genré pourrait nous permettre de promouvoir efficacement l’égalité à travers un processus budgétaire objectif et de la mettre en perspective.
En conclusion, les horizons climatiques et sociaux se dessinent plus clairement, plus rapidement, en gardant le cap à l’aide d’un bon compas et ce sont ces perspectives que vous nous avez présentées. C’est la clarté et la cohérence de nos décisions politiques pour répondre à l’urgence écologique qui est à la fois climatique, sociale et économique, c’est le respect des engagements pris auprès des citoyens qui permettent aussi de redonner du souffle à notre démocratie.”
“Replacer l’économie au service de l’humain”
Le budget primitif fixe les dépenses et les recettes de la collectivité pour l’année à venir. Il met en œuvre les orientations budgétaires déjà débattues.
Maud Dumont, Co-Présidente du groupe, est intervenue pour rappeler les priorités des écologistes en matières sociale et écologique.
Le Département doit ainsi continuer de manière volontariste sa politique de l’”aller vers” pour diminuer le non-recours aux droits octroyés dans le cadre des politiques de solidarité. Il doit aussi s’engager avec force et détermination pour lutter contre l’urgence climatique et sociale et le faire avec un suivi efficace pour prioriser les actions.
Les règles de finances publiques actuelles conduisent le Département à devoir compter, malgré lui, sur des recettes tirées en grande partie de la surconsommation, de la pollution, de l’artificialisation des sols, alors que ces facteurs creusent les inégalités.
Le fléchage de ces recettes doit donc être irréprochable pour contrebalancer ce système.
L’intervention dans son intégralité :
“Monsieur le Président, mes cher.e.s collègues,
Dans un contexte de crise sanitaire impactant nombre de domaines, le Département de la Gironde continue de démontrer sa capacité à faire de ce territoire, un territoire à l’écoute de ses habitants, un territoire solidaire, un territoire résilient.
Ce contexte sanitaire nous oblige à encore plus de prudence dans notre construction budgétaire et dans la manière de prendre soin des Girondins et des Girondines. Cela passe par un accompagnement personnel, mais aussi un accompagnement des territoires via l’aide aux communes qui se poursuit de manière volontariste malgré tout.
Un milliard (1047,2M€). C’est ce que dépensera le Département pour ses actions solidaires l’an prochain.
Le RSA représente presque un quart de ce budget, à savoir 255M €. Cela pourrait être beaucoup plus. Le taux de recours au RSA est estimé en moyenne à 50 %. Méconnaissance des dispositifs existants, coût et complexité d’accès à ces aides, mais surtout effet stigmatisant de recours à des aides sociales…
Les raisons sont connues, il nous faut continuer à lutter contre le non-recours au droit. Nous nous y employons chaque jour, avec la politique de l””aller vers”. Il faut aller vers les Girondins et les Girondines, de façon équitable sur tout le territoire.
La commande publique est un levier important pour répondre à l’objectif d’un budget résilient. Pour cela, nous devons connaître l’impact de nos dépenses, tant sur le plan social qu’environnemental, pour ne pas amplifier ce que nous combattons : l’augmentation des inégalités et du dérèglement climatique. Nous manquons aujourd’hui d’indicateurs, et nous devons progresser sur ce sujet.
La politique de solidarité du Département s’appuie sur des recettes basées sur la consommation, l’attractivité et la croissance, le tout sans levier fiscal :
- Croissance. Nous dépendons en autres des produits de la TVA, une taxe inéquitable qui frappe toutes et tous sans distinction.
- Consommation, car nous dépendons en autres de la consommation des carburants via la Taxe Intérieure de consommation de produits énergétiques.
- Attractivité, car nous dépendons des Droits de Mutation à Titre Onéreux que l’on perçoit sur la vente d’un bien immobilier.
Ces trois éléments sont dépendants de ce que nous combattons : surconsommation, pollution, artificialisation des sols.
Face à ce paradoxe, nous devons changer de paradigme : replacer l’économie au service de l’humain, et non l’inverse. Pour nous protéger nous humains, mais également le vivant.”
Budget primitif sur les mobilités : entre gaspillages et nécessités
Le budget primitif global a ensuite été décliné en budgets primitifs thématiques, basés sur les délégations des Vice-Président.e.s.
Le groupe des élu.e.s écologistes a voté l’intégralité des budgets à l’exception de celui concernant les mobilités.
Celui-ci prévoyait notamment d’inscrire 60 000 000 millions d’euros en Autorisation de Programme (support de l’engagement de dépenses qui peuvent s’étaler sur plusieurs années) et 8 193 000 millions d’euros en Crédits de Paiement (support de règlement de la dépense engagée au préalable, à payer pendant l’année) pour poursuivre les travaux de la déviation du Taillan-Médoc, déviation contre laquelle les écologistes se sont toujours battus.
Les déviations, routes ou voies supplémentaires ne permettent pas de fluidifier les flux. Ils sont systématiquement à nouveau saturés par le trafic résultant de l’augmentation du trafic commercial, le changement des habitudes de déplacement, la migration de la population, et, dans une moindre mesure, le détournement du trafic provenant d’autres voies.
Au total, on retiendra donc les impacts écologiques importants (artificialisation des sols, accélération de la perte de la biodiversité, îlot de chaleur, amplification des risques d’inondations, accroissement des dépenses pour l’entretien de la route, amplification de la fracture territoriale…).
Cette déviation est donc un gouffre financier inutile et climaticide.
Ce budget primitif prévoit aussi l’entretien et la création de voies permettant de développer les mobilités douces, raison pour laquelle le groupe ne s’est qu’abstenu.
Crise sanitaire : la santé mentale des jeunes encore plus mise à rude épreuve
Le groupe écologiste, sur proposition d’Agnès Destriau, conseillère départementale du canton de Pessac 2 et professeure de biologie, a souhaité porter le sujet du bien-être et de la santé mentale des jeunes.
Présentée par Maud Dumont, Co-Présidente du groupe, cette motion a été travaillée avec les groupes PS et apparentés et PC. Votée par tous les élu.e.s de la majorité (le groupe Gironde Avenir n’a pas pris part au vote). Nous demandons à l’État de prendre la mesure de l’aggravation de la santé mentale des jeunes, notamment en cette période de pandémie.
L’intervention dans son intégralité :
“Le groupe des élu.e.s Écologie et Solidarités a souhaité porter le sujet de la santé mentale chez les jeunes avec cette motion. Elle a été déposée avec le PS et apparentés et le PC.
Il s’agit malheureusement d’un fait triplement d’actualité :
- Nous sommes confrontés à la 5ème vague qui risque d’aggraver encore une fois le mal-être structurel des enfants
- Le gouvernement a renoncé à dépenser 75 millions d’euros qui étaient nécessaires à bien des niveaux, et notamment celui du handicap et de la santé mentale dans les collèges
- Le nouveau rapport de la Défenseure des droits portant sur la santé mentale des enfants a été publié à la même époque.
La préservation du bien être et de la santé mentale des jeunes devrait être une priorité. Nous demandons dans cette motion à l’État de s’en saisir pleinement à travers une série de mesures que nous préconisons. Je citerai notamment
- le renforcement quantitatif de l’offre de soin en pédopsychiatrie sur tout le territoire
- et le renforcement de la médecine scolaire. Le taux d’occupation des postes consacrés au médico-social dans l’Éducation nationale n’est que de 69% alors qu’il devrait être de 100% minimum.
Par cette motion, le Conseil Départemental dira aussi sa détermination à faire progresser le sujet en se portant volontaire à l’expérimentation du déploiement de maisons des enfants si l’État souhaitait mener une étude d’opportunité en pratique.
Elle est aussi l’occasion de mettre en avant la création d’un service public de prévention, allant de la petite enfance à la jeunesse. “
Texte de la motion
“Dans un contexte sanitaire fragilisant, les enfants ont dû se confronter à plusieurs conséquences des différents confinements et mesures sanitaires : restriction de la vie sociale et familiale, baisse des activités physiques ou de loisirs, augmentation de l’exposition aux écrans, difficultés d’apprentissage liées au distanciel ou au port du masque, exposition au stress dû aux difficultés financières des parents, confrontation à la mort et aux risques… Cela a pu conduire chez certains enfants à une augmentation des angoisses, du stress, de la dépression et/ou des troubles alimentaires. Ces troubles psychologiques ont touché plus violemment encore les jeunes qui vivaient déjà dans des situations fragilisantes et les jeunes porteurs de handicap. Le Département de la Gironde s’inquiète donc, à double titre, de cette situation et est déterminé à continuer à faire progresser la santé mentale des jeunes.
Ce sujet de la santé mentale a fait l’objet d’un rapport publié par Claire Hédon, et le Défenseure des enfants, Éric Delemar, le 16 novembre dernier. Ils y font d’ailleurs état d’une aggravation du mal-être structurel des enfants en raison de la crise sanitaire. Ce rapport souligne aussi l’insuffisance de la prise en compte du bien-être de l’enfant dans le cadre de sa scolarité et demande une réponse aux carences du secteur de la santé mentale qui devrait être considérée comme une priorité des politiques publiques.
Dans le même temps, le gouvernement a renoncé à dépenser 75 millions d’euros qui faisaient partie du budget alloué à l’Éducation nationale pour 2021. Dans le public, cela correspond à une perte de :
- Plus de 15 millions d’euros pour le second degré, et de 2,3 millions d’euros pour le premier degré ;
- 40 millions d’euros pour « la vie de l’élève » qui correspond à la médecine scolaire et les actions en faveur de l’inclusion des élèves en situation de handicap, comme le recrutement et la rémunération des AESH ;
- 15 millions pour l’organisation d’examens et de concours.
De plus, les effectifs professionnels de l’Éducation nationale consacrés au médico-social (médecins, infirmier·ère·s, psychologues, et assistant·e·s sociaux·les) sont largement insuffisants pour couvrir la totalité des besoins des enfants. En 2013, le taux d’occupation de ces postes était de 83% contre seulement 69% en 2020. Le rôle d’accompagnement, de prévention et de soin de ces professionnel·le·s est pourtant indispensable.
Au double titre de ses compétences liées à l’enfance et au collège, le Conseil Départemental de la Gironde souhaite que la question de la santé mentale des enfants soit davantage investie grâce à la mise en œuvre de réponses concrètes et d’investissements adéquats et nécessaires. Les recommandations du rapport de la santé mentale doivent être rendues effectives afin de permettre aux jeunes de préserver leur santé mentale et leur bien-être. Ainsi, le Conseil Départemental souhaite demander à l’État :
- De renforcer quantitativement l’offre de soin en pédopsychiatrie sur tout le territoire afin d’assurer l’égalité dans l’accès aux soins y compris s’agissant de l’aide sociale à l’enfance.
- De renforcer la médecine scolaire en garantissant au minimum un taux d’occupation des postes de 100% voire au-delà pour répondre aux besoins.
- De recruter davantage d’enseignant·e·s et d’assistant·e·s d’éducation pour pouvoir construire des projets éducatifs personnalisés ne pouvant être mis en place que si les effectifs des classes restent raisonnables.
- De renforcer la formation initiale et continue des enseignant·e·s et des assistant·e·s par des apports de connaissances en psychologie de l’enfant et de l’adolescent·e indispensables pour permettre à chaque acteur·rice éducatif·ve de détecter les signes de détresse et pour mieux accompagner les familles vers une prise en charge adaptée.
- D’encourager et de faciliter les classes-nature facteur de bien-être et d’oxygénation.
Le Conseil Départemental décide :
- D’expérimenter le déploiement de maisons d’enfants sur le modèle des maisons des adolescent·e·s déjà existantes dans le cas où l’État mènerait une étude de faisabilité et d’opportunité comme recommandé dans le rapport. Le dispositif Écout’emoi pourrait ainsi se déployer plus largement pour faciliter l’orientation et l’accueil des jeunes en difficulté.
- De s’engager dans une création d’un service public prévention allant de la petite enfance à la jeunesse avec un parcours particulier portant sur l’accompagnement de la parentalité.”